Bloc nationaliste, populisme et stratégie écosocialiste
La notion
de peuple est d’abord une notion politique. Elle a donc nécessairement une
dimension stratégique. Le pouvoir est toujours à conquérir ou à conserver
contre un ennemi ou un concurrent, réel ou supposé, du peuple. - Sadri
Khiari
Toute stratégie doit être ancrée dans une
analyse de la conjoncture, et toute situation historique résulte d’un concours
de facteurs économiques, sociaux, idéologiques, politiques, et internationaux.
Le rôle d’un parti progressiste n’est donc pas seulement d’élaborer un projet
de société, c’est-à-dire un programme de réformes unifiant les revendications
des mouvements sociaux sur le terrain électoral, mais de s’insérer sur le
terrain mouvant des circonstances en
organisant activement la base sociale sur laquelle elle prendra appui
pour conquérir les institutions qui lui permettront de transformer la société.
Cette base sociale n’est pas une chose inerte, une substance hors du temps,
mais un tissu de relations complexes et contradictoires, un processus
historique. Le rapport entre les urnes et la rue n’est donc pas de représentation, mais d’articulation et d’unification de forces sociales hétérogènes pour former un peuple, qui est toujours une
construction idéologique et politique.
Depuis le « printemps québécois » qui a
provoqué un véritable électrochoc dans la société, la conscience
populaire s’est soudainement politisée. Cela ne signifie pas que la majorité
souhaite un réel changement social, mais que le « consensus » et la
« peur de la chicane » qui semblaient caractériser le peuple
québécois sont maintenant choses du passé. La polarisation de l’espace public
revient en force, participant ainsi à la reconfiguration des forces sociales,
idéologiques et politiques. L’élection du Parti québécois et sa stratégie populiste
doivent être analysées dans ce contexte, caractérisé par l’émergence d’un front
nationaliste et conservateur sur fond d’une crise structurelle du « modèle
québécois ». Cette métamorphose se manifeste notamment par le fait que le
PQ reprenne plusieurs points du programme politique de 2007 de la défunte ADQ :
coupures dans l’aide sociale, réforme de l’État-providence, compressions dans
les commissions scolaires, création d’une charte des valeurs québécoises. Cette
stratégie permet de gruger l’électorat de la Coalition Avenir Québec, qui se
limite à un pragmatisme comptable au détriment de la question identitaire,
beaucoup plus rassembleuse.
Le bloc historique
L’électoralisme ne saurait expliquer
complètement ce déplacement, qui résulte davantage de la constitution d’un
nouveau « bloc historique ». Ce concept issu du lexique gramscien
permet de dépasser le schéma marxiste traditionnel de la lutte des classes, opposant
deux forces sociales bien définies par leur position antagoniste dans le
système de production (infrastructure). En fait, Gramsci ne rejette pas l’idée
des classes sociales, mais replace ces entités économiques sur le terrain
complexe, contradictoire et discordant de la superstructure, c’est-à-dire dans
le champ de la société civile et des institutions politiques, lieu de
consentement et de coercition, d’idéologie et de luttes pour l’hégémonie.
Ainsi, des classes sociales dominées sont généralement soudées idéologiquement
à certaines élites, formant des unités en devenir que nous pouvons
appeler blocs historiques. Les partis politiques, bien qu’ils s’opposent
souvent sur des questions mineures en essayant de soudoyer les mêmes classes,
forment parfois une unité plus grande qui se manifeste lorsque les débats de
société refont surface.
« La vérité théorique selon laquelle chaque
classe a un seul parti, est démontrée, dans les tournants décisifs, par le fait
que les regroupements divers qui tous se présentent comme Parti « indépendant »
se réunissent et forment un bloc unique. La multiplicité qui existait
auparavant était uniquement de caractère « réformiste », c'est-à-dire
qu'elle concernait des questions partielles ; en un certain sens, c'était une
division du travail politique (utile, dans ses limites) ; mais chacune des
parties présupposait l'autre, au point que dans les moments décisifs, c'est-à-dire
précisément quand les questions principales ont été mises en jeu, l'unité s'est
formée, le bloc s'est réalisé. »[1]
L’ancienne coalition souverainiste et
progressiste basée sur la phase ascendante des Trente glorieuses est maintenant
arrivée à terme, l’impasse du projet de René Lévesque menant au point de
bifurcation suivant : virage solidaire et reconstruction du mouvement
d’émancipation populaire, ou virage nationaliste visant la restauration d’une identité
québécoise menacée. Le bloc nationaliste n’est pas souverainiste, car la ligne
de démarcation ne découle pas de la question de la souveraineté, mais de la
définition même de le la Nation par le biais des valeurs québécoises. Cette
métamorphose du mouvement souverainiste donne naissance à un nouvel amalgame de
groupes hétérogènes et contradictoires, ayant comme ciment la laïcité de l’État
québécois. Loin de représenter un principe abstrait de régulation des
institutions publiques, la laïcité comporte une charge émotive redoutable. En
effet, il s’agit d’un projet collectif visant à « compléter la démarche
historique de laïcisation » entrepris par la Révolution tranquille, qui
constitue le socle de l’identité moderne du Québec. Le tour de force des
nationalistes conservateurs consiste à reprendre ce processus de modernisation
virtuellement émancipateur en l’articulant à l’affirmation d’une culture constitutive,
c’est-à-dire le prolongement d’une tradition. D’où l’accent mis sur la culture
majoritaire et la préservation du patrimoine, au prix d’une apparente
contradiction manifestée par le maintien du crucifix dupplessiste à l’Assemblée
nationale. Qu’importe de préserver le symbole de l’alliance entre l’Église et
l’État ; l’essentiel est de protéger l’identité nationale par l’obéissance
aux valeurs traditionnelles, d’assurer la survivance de la race canadienne
française en tournant le dos à « l’échec » du progrès social et du
pluralisme, caricaturé par l’étiquette de « gauchisme
multiculturaliste ».
La fracturation ethnique
La formation de ce « peuple
ethnique », qui sous-tend le processus historique du bloc nationaliste,
n’est pas clairement explicité par les promoteurs de la Charte des valeurs
québécoises parce que l’uniformisation culturelle et le conformisme social qu’elle
implique sont difficilement avouables. Ce qui relève d’une évidence hégémonique
par contre, ce que nul n’oserait critiquer sans risquer d’être couvert de
ridicule, c’est la « neutralité de l’État » et l’égalité entre les
hommes et les femmes. Ces principes rassembleurs peuvent en effet susciter
l’adhésion de plusieurs groupes apparemment incompatibles : les vieux
laïcistes « progressistes », une partie importante du mouvement
nationaliste, la droite xénophobe, des féministes de première et deuxième
génération, certains intellectuels de « gauche », des militantes
anti-islamistes, la mouvance identitaire, etc. Qui aurait cru voir un jour se
réunir dans un même panier Janette Bertrand, Guy Rocher, Bernard Drainville,
Julie Snyder, Martine Desjardins, Richard Martineau, Djemila Benhabib, Roméo
Bouchard et Mathieu Bock-Côté ? À l’inverse, qui aurait imaginé une
opposition au projet de Charte rassemblant Gérard Bouchard, Amir Khadir, Maria
Mourani, Gabriel Nadeau-Dubois, Stéphane Gendron, le Parti libéral du Québec,
Michel Seymour, la Fédération des femmes du Québec, Michel Rivard, Denis
Coderre et Laure Waridel ? Cette restructuration de l’espace public
québécois est pour le moins déconcertante.
Les récentes tensions qui déchirent les rangs
souverainistes, féministes et progressistes témoignent d’une
« fracturation ethnique » de la société québécoise. À vrai dire, le
fait que la polarisation de la question identitaire soit transversale,
c’est-à-dire qu’elle ne respecte pas les divisions classiques selon l’axe
gauche/droite ou souverainiste/fédéraliste, montre le caractère structurant de
cette idéologie, c’est-à-dire l’hégémonie qu’elle exerce sur les autres enjeux
sociaux. Comme l’hégémonie désigne toujours l’influence culturelle, morale et
politique d’un groupe sur un autre, il est nécessaire de mettre en lumière
l’articulation entre classes dominantes et dominées au sein de cette formation
sociale. Pour ce faire, nous reprendrons l’analyse de la configuration des
blocs historiques élaborée dans un texte de mai 2013, dont les projections
semblent maintenant confirmées.
Parti libéral du Québec
|
Parti québécois
|
Coalition Avenir Québec
|
|
Classes
dominantes
|
grande et moyenne bourgeoisie
anglophone, patronat
|
bourgeoisie francophone,
élites nationalistes et technocratiques
|
petite et moyenne bourgeoisie
régionale, élites conservatrices
|
Classes
dominées
|
travailleurs anglophones,
communautés culturelles, classes moyennes francophones fédéralistes
|
milieux syndicaux et
communautaires cooptés, classes moyennes et ouvrières francophones et
souverainistes
|
classes moyennes
conservatrices et déclinantes, travailleurs frustrés, lumpenprolétariat
|
Ces
trois partis élitistes recoupent en fait deux blocs historiques : le
premier est dominé par la bourgeoisie anglophone urbaine (dont l’expression
politique est le PLQ), alors que le deuxième est dirigé par la bourgeoisie
francophone et régionale, sur laquelle le PQ et la CAQ tentent d’asseoir leur
hégémonie. Ce n’est pas un hasard si le principal « potentiel de
croissance électorale » du PQ est à droite de l’échiquier politique
(classes moyennes conservatrices), comme l’a bien montré Philippe Brisson de la
firme de conseil stratégique STRATEGEUM lors de son discours au congrès de la
Convergence nationale en mai 2013. Un éventuel effondrement du PQ ou de la CAQ
amènerait une migration du 30% en faveur de l’autre parti, ce qui explique
pourquoi le PQ continue son virage à droite malgré la frustration de la frange
« gauche et indépendantiste » de son bloc historique.
Six mois plus tard, le processus d’unification
du bloc nationaliste semble confirmé. Le leadership moral et politique du PQ a
complètement balayé la CAQ de la carte, malgré la vision économique de son chef
qui n’a pas réussi, avec la publication de son livre Cap sur un Québec gagnant, à susciter l’engouement populaire. Le
principal bénéficiaire du ressac engendré par le projet de Charte reste le PLQ,
qui représente l’autre bloc dominant, toujours plus accroché au statu quo. Les
tiers partis, comme Option nationale et Québec solidaire, ne profitent guère de
cet antagonisme. L’espace politique semble donc écartelé entre deux
pôles : le maintien du modèle québécois et la défense de l’économie d’une
part, et l’affirmation nationale pour contrer les dangers d’une immigration
sans balises d’autre part. L’approfondissement de cette polarisation pourrait
contribuer à l’émergence de l’extrême-droite, même si celle-ci n’est pas encore
clairement organisée sur le plan politique jusqu’à maintenant.
L’impasse social-démocrate
Le Québec n’échappe pas aux tendances lourdes
du contexte international. C’est pourquoi il faut rompre avec le mythe de
l’exceptionnalisme québécois, c’est-à-dire l’idée selon laquelle notre société serait
fondamentalement progressiste et tolérante, et donc immunisée contre le
conservatisme et la xénophobie qui surgissent dans les contextes de crise
sociale, démocratique et économique. Il est donc honorable mais vain, et même
peut-être naïf de proposer la paix sociale et la défense du modèle québécois,
de lutter contre le virage nationaliste par la recherche d’un compromis.
L’ancien consensus social issu de la Révolution tranquille est maintenant
brisé ; la concertation néocorporatiste est une illusion masquant
l’asymétrie des rapports de force depuis trente ans, ignorant que l’efficacité
du compromis de classes dépend d’un pouvoir ouvrier organisé et combatif et
d’une croissance économique soutenue.
Aujourd’hui, la social-démocratie ne peut plus
se démarquer idéologiquement et politiquement du centre-droit, qui aspire à gérer
l’appareil d’État en essayant de réparer les pots cassés. Pour le meilleur et
pour le pire, cette gauche modérée est devenue conservatrice, la droite
radicale prenant les allures d’une alternative réelle au système actuel. Le
bloc nationaliste tente de rassembler un « peuple » contre le pouvoir
en place, assimilant celui-ci à la classe politique, aux intellectuels et aux
syndicats. Il appelle ainsi le démantèlement de l’État social tout en
conservant la nécessité d’un contrôle étatique fort sur le plan de la sécurité,
du contrôle de l’immigration et de la répression des fondamentalismes, qu’ils
soient gauchistes ou islamistes. Ce populisme autoritaire ne doit pas être
décrié comme une forme d’irrationalité des masses qui viendrait bousculer la rationalité
du consensus québécois, mais être considéré comme une réponse cohérente
(quoique non appropriée) à une crise sociale bien réelle. Une fausse solution à
vrai problème, en d’autres termes.
Le retour du populisme
L’élaboration d’une riposte à l’hégémonie du
bloc nationaliste ne peut pas se limiter à une simple contestation dans la rue,
l’intervention de la gauche sur le terrain parlementaire, la création d’espaces
publics parallèles ou la multiplication des mouvements sociaux. Ces
manifestations sont importantes, mais ne sauraient à elles seules offrir une
réponse cohérente à la panne globale de la société québécoise. Il s’agit ni
plus ni moins de reconstruire l’unité du peuple québécois. Cela nécessite
d’envisager autrement le phénomène du « populisme », terme qui est
trop souvent utilisé pour dénigrer des adversaires politiques ayant recours à
une idéologie floue et aux émotions pour manipuler les masses. En effet, quel
lien y a-t-il entre des populistes aussi divers que Hugo Chávez,
Marine Le Pen, Juan Domingo Perón, Jean-Luc Mélanchon, Régis Labeaume et Denis
Coderre ?
« Contrairement aux idéologies
stratégiquement structurées – telles le communisme, le socialisme, le fascisme,
le libéralisme, le féminisme, l’écologisme, etc. –, la notion de populisme ne
réfère à aucun corpus stabilisé de principes doctrinaux. Le populisme est de
droite comme de gauche ; il est fasciste autant que démocratique ou
socialiste ; modernisateur et archaïque ; multi-classiste autant
qu’ouvriériste ou paysan ; etc. »[2]
Dans son ouvrage La raison populiste
(2009), le philosophe Ernesto Laclau essaie de dépasser les impasses de la
littérature consacrée au populisme par une théorie fort originale. Tout
d’abord, il fait remarquer que « le peuple
ne constitue pas une expression idéologique, mais une relation réelle entre
acteurs sociaux. Autrement dit, c’est une manière de constituer l’unité du
groupe. »[3]
L’identité populaire se forme à partir d’une articulation d’éléments
disparates. Quels sont ces éléments ?
Laclau fait appel à la catégorie de « demandes sociales » qui
peuvent rester isolées ou s’unir dans un contexte particulier. Pour illustrer
ce phénomène, il prend l’exemple d’un pays du Sud.
« Imaginons qu’une masse de migrants
d’origine rurale s’installent dans un bidonville situé à la périphérie d’une
grande ville industrielle en développement. Apparaissent des problèmes de
logement, et ceux qui sont concernés par ces problèmes demandent aux autorités
locales une solution. Ici, nous avons une demande
qui, à l’origine, n’est peut-être qu’une pétition.
Si la demande est satisfaite, les choses en resteront là ; mais si elle ne
l’est pas, les gens peuvent s’apercevoir que leurs voisins ont d’autres
demandes qui ne sont pas non plus satisfaites – des problèmes concernant l’eau,
la santé, la scolarisation des enfants, etc. Si la situation reste inchangée
pendant un certain temps, les demandes insatisfaites s’accumuleront et le
système institutionnel sera de plus en plus incapable de les intégrer d’une
manière différenciée (chacune isolément des autres), ce qui établit entre elles
une relation d’équivalence. Cela pourrait facilement aboutir, si des facteurs
extérieurs n’interviennent pas, à la constitution d’un fossé de plus en plus
grand entre le système institutionnel et les gens. »[4]
Les demandes
démocratiques isolées qui demeurent
non satisfaites forment entre elles une chaîne d’équivalences, qui permet à son
tour l’émergence d’une subjectivité sociale plus large et de demandes populaires. « Elles
commencent ainsi, à un niveau embryonnaire, à constituer le peuple comme acteur
historique potentiel. Ici, nous avons déjà deux préconditions évidentes du
populisme : 1) la formation d’une frontière intérieure antagoniste
séparant le peuple du pouvoir ; 2) une articulation de demandes
équivalentes qui rendent possible l’émergence du peuple. Il y a une troisième
précondition qui ne se réalise que lorsque la mobilisation politique atteint un
niveau supérieur : l’unification de ces différentes demandes – dont
l’équivalence, jusque-là, n’avait pas dépassé un vague sentiment de solidarité
– en un système stable de signification. »[5]
Le rôle de la synecdoque
L’unification symbolique représente le
socle de l’identité populaire. Elle se forme essentiellement au sein du
discours par le biais de la rhétorique, c’est-à-dire par l’utilisation de
procédés comme la synecdoque qui permet la représentation du tout par la
partie. Laclau insiste particulièrement sur cette figure de style, car elle
renvoie directement à la relation d’hégémonie, où un groupe social particulier
cherche à représenter la totalité sociale. Cette analyse linguistique
apparemment abstraite permet de distinguer deux façons de conceptualiser le
peuple. La première perspective consiste à identifier le peuple avec l’ensemble
des membres d’une communauté, tous les membres de la population du Québec par
exemple.
« Dans le cas du populisme, c’est le
contraire qui arrive : une frontière d’exclusion divise la société en deux
camps. Le peuple, dans ce cas, est moins que la totalité des membres d’une communauté :
c’est un élément partiel qui aspire néanmoins à être conçu comme la seule
totalité légitime. La terminologie traditionnelle – qui a été traduite dans le
langage commun – éclaire cette différence : le peuple peut être conçu soit
comme populus – ensemble de tous les
citoyens – soit comme plebs –
ensemble des plus démunis. Mais même cette distinction ne rend pas exactement
compte de ce que je cherche à exprimer. Car cette distinction pourrait
facilement être vue comme une distinction juridiquement reconnue, auquel cas
elle ne serait qu’une différenciation au sein d’un espace homogène qui donne
une légitimité universelle à tous les éléments qui le composent – autrement
dit, la relation entre les deux termes ne serait pas une relation d’antagonisme.
Pour concevoir le peuple du populisme, il est nécessaire d’ajouter quelque
chose : nous avons besoin d’une plebs
qui prétende être le seul populus
légitime, c’est-à-dire d’une partie qui veuille jouer le rôle de la totalité de
la communauté. (« Tout le pouvoir aux soviets » - ou l’équivalent
d’un tel mot d’ordre dans d’autres discours – serait une affirmation
strictement populiste.) »[6]
Dans le cas du bloc nationalise, le peuple ne
désigne pas l’ensemble des citoyens du Québec, mais les personnes issues de la
communauté francophone d’origine, la culture majoritaire, c’est-à-dire les
québécois de souche. Cette « plèbe » ou cette majorité silencieuse
prétend ainsi représenter l’identité de la Nation, par opposition au camp
adverse qui tente de diluer les valeurs québécoises : les universitaires,
gauchistes postmodernes et élites médiatiques favorables aux accommodements
raisonnables et au multi-inter-culturalisme. Le nationalisme identitaire représente
donc une véritable forme de populisme, aux accents conservateurs et
potentiellement xénophobes. Il prend une partie de la société québécoise comme
le seul représentant légitime du peuple, ici conçu par l’adhésion à une culture
commune. Bien que Mathieu Bock-Côté déplore l’usage du terme « nationalisme
ethnique », celui-ci est probablement le plus approprié pour désigner
cette idéologie et la polarisation qu’elle suscite.
Le peuple de gauche
Compte tenu des dérives du populisme de
droite, la réaction spontanée d’une personne progressiste serait de rejeter
toute référence au mot « peuple », de se méfier du nationalisme et de
considérer la question identitaire comme un faux débat qui nous écarte des
vrais enjeux, comme la montée des inégalités économiques et la destruction de
l’environnement. Or, ce serait une erreur d’abandonner l’usage du mot peuple
aux conservateurs et de renier la question nationale au profit d’une
perspective seulement basée sur les classes et la justice sociale. La lutte de
libération nationale doit être repensée à nouveaux frais, et c’est pourquoi il
est essentiel de distinguer les différentes configurations historiques du
peuple québécois.
Si nous regardons le mouvement
souverainiste attaché à la figure de René Lévesque et qui s’incarne aujourd’hui
dans le discours du parti Option nationale, « la citoyenneté se confond
complètement avec la souveraineté populaire, laquelle se noie à son tour dans
la souveraineté nationale. Dans ce cas, l’union nationale interclassiste
assimile, au moins dans la représentation qu’elle se fait d’elle-même, toutes
les composantes de la population dans un peuple-nation indissociable. »[7]
Il n’y a donc pas ici de populisme au sens strict, pas d’antagonisme interne.
Dans le cas du mouvement indépendantiste par contre, qui prit forme dans le Rassemblement pour l’indépendance nationale
(RIN), le Mouvement de libération populaire (MLP) et le Front de libération du
Québec (FLQ), le projet d’indépendance était lié étroitement à une lutte pour
l’émancipation sociale. Les divisions de classes recoupaient largement une
division ethnique : travailleurs francophones contre bourgeois
anglophones. « Le peuple-nation s’identifie alors avec les catégories
subalternes de la population, tandis que les classes dominantes sont assimilées
à l’étranger, extériorisées par rapport au peuple-nation. »[8]
Aujourd’hui par contre, nous ne pouvons plus
miser sur cette coïncidence heureuse entre exploitation économique et
oppression nationale, qui fournissait jadis le terreau fertile d’une lutte
populaire contre l’ordre établi dans les années 1960 et 1970. La création d’une
bourgeoisie francophone et la montée des classes moyennes, l’amélioration du
niveau de vie par le travail conjoint de l’État-providence et la société de
consommation, ont en quelque sorte détruit la base sociale sur laquelle pouvait
s’articuler le combat pour l’indépendance et la lutte des classes. Cependant,
il ne faut pas conclure pour autant que nous soyons condamnés au « confort
et à l’indifférence » des masses, car l’impasse du modèle québécois, le
dérèglement du climat et la crise du capitalisme concoctent une situation
hautement explosive pour les vingt prochaines années.
Si plusieurs ont déclamé
la fin de l’Histoire après l’effondrement du régime soviétique, par le triomphe
de la démocratie libérale et la mondialisation néolibérale, cette ère
« post-idéologique » est maintenant chose du passé. Les antagonismes
refont surface, le 1% qui contrôle la richesse et le 99% qui occupe les grandes
villes du monde, tout cela témoigne d’une phase ascendante des luttes sur le
plan international. Le mouvement des Indignados ou Occupy représente sans doute la manifestation la plus vive de ce « spontanéisme révolutionnaire ». Cette tendance se retrouva dans une impasse à cause du refus de toute médiation ou institution allant au-delà de la stricte démocratie de consensus. Le populisme de gauche doit en quelque sorte s'enraciner dans cet élan de démocratie radicale, tout en le prolongeant par le biais de l'organisation qui lui donnera une force politique véritable et durable.
À l’échelle nationale, il faut tirer parti de
ce processus historique en construisant
l’équivalence entre les classes dominées et le peuple québécois, car cette
articulation n’est plus simplement donnée. Nous n’avons plus affaire au
peuple-nation du mouvement souverainiste, ni à la « classe ethnique »
sous-jacente à la lutte indépendantiste ; mais il est possible d’élaborer
un populisme de gauche qui prendrait appui sur la plèbe, en articulant des
demandes sociales qui s’incarneraient dans une lutte populaire pour
l’émancipation nationale et sociale.
« L’aiguisement de la lutte des classes ou une situation révolutionnaire
tendent à assimiler le peuple aux couches subalternes. Dans cette situation, la
souveraineté nationale se dissout dans la souveraineté populaire. »[9] Ainsi, il s’agit de s’opposer au bloc nationaliste, qui réduit la
souveraineté du peuple à l’identité nationale en fracturant l’espace québécois
sur une base ethnique, par un bloc populaire contre-hégémonique qui écarte la
question identitaire en reposant un antagonisme fondamental sur le terrain
social. Il faut donc remplacer le mythe de la Nation par l’action du peuple aspirant
à gouverner une société libre, égalitaire et écologique.
« Le populus
en tant que donné – en tant qu’ensemble des relations sociales telles qu’elles
sont réellement – se révèle à lui-même comme fausse totalité, comme partie qui
est source d’oppression. D’un autre côté, la plebs, dont les demandes partielles s’inscrivent dans l’horizon
d’une totalité au sens plein – une société juste qui n’existe qu’idéalement –
peut aspirer à constituer un populus
véritablement universel qui est nié par la situation existant réellement. C’est
parce que ces deux visions du populus
sont rigoureusement incommensurables qu’une certaine particularité, la plebs, peut s’identifier au populus conçu comme totalité
idéale. »[10]
Repenser la lutte des classes
Une prémisse du populisme de gauche est que la
lutte des classes n’est pas terminée, mais que les métamorphoses sociales,
économiques et politiques du XXIe siècle exigent la construction
d’un nouveau bloc historique qui va au-delà du mouvement ouvrier. L’idée que l’évolution
des antagonismes fait avancer l’histoire par bonds est une thèse marxiste
classique, qui se retrouve dans la section I du Manifeste du parti communiste.
« L’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire des
luttes de classes. Hommes libres et esclaves, patriciens et plébéiens, barons
et serfs, maîtres de jurande et compagnons, en un mot, oppresseurs et opprimés,
en opposition constante, ont mené une guerre ininterrompue, tantôt ouverte,
tantôt dissimulée ; une guerre qui finissait toujours ou par une
transformation révolutionnaire de la société tout entière, ou par la
destruction des deux classes en lutte. »[11]
Néanmoins, le fait que la société du XIXe
siècle était divisée en deux camps opposés, la bourgeoisie et le prolétariat,
les patrons d’usines et les ouvriers, ne semble plus aussi évidente
aujourd’hui. L’ère de la bourgeoisie n’est pas terminée, mais le capitalisme
tardif, le régime postfordiste et les plans d’austérité opposent davantage une
oligarchie toujours plus puissante à une masse de chômeurs, femmes, jeunes,
précaires, exclus qui composent la « non-classe des
non-travailleurs », pour rependre l’expression d’André Gorz. Ce
prolétariat post-industriel, également nommé « précariat », constitue
un nouveau sujet collectif beaucoup plus subversif que les travailleurs
syndiqués de jadis. Mais il ne constitue pas pour autant un sujet politique, et encore moins un acteur révolutionnaire parce qu’il
demeure largement fragmenté et sans conscience unitaire. Il représente davantage
un amalgame de nouveaux mouvements sociaux (étudiants, féministes, écologistes,
altermondialistes), d’intellectuels précarisés, de travailleurs temporaires
étrangers, de musulmanes reléguées, de petits paysans sans terre, de classes
moyennes déclassées, etc. D’où l’importance d’une unification symbolique par le
développement d’une conscience populaire capable de réunir les classes dominées
dans une lutte commune pour la transformation de la société.
Aujourd’hui, il est nécessaire d’abandonner la
distinction du « marxisme orthodoxe » entre bourgeois et prolétaires,
sans pour autant abandonner l’exigence marxienne visant à dégager l’antagonisme
fondamental d’une société dans une période historique déterminée. Comme il a
été mentionné plus tôt, le populisme de gauche renvoie davantage à l’idée de la
plèbe dans la Rome antique. La plèbe représente une partie du peuple (populus), c’est-à-dire des citoyens
romains distincts des esclaves mais opposés aux patriciens et à la nobolitas ; c’est la partie du
peuple qui s’oppose à l’organisation oligarchique de la cité. Évidemment, il ne
s’agit pas de restaurer la plèbe romaine sous sa forme juridique et historique,
mais bien de faire un parallèle permettant de tracer les contours du peuple
québécois contemporain. De plus, la plèbe romaine n’avait pas de contours
clairement définis, car elle accueillait tous ceux qui partageaient son
opposition à l’oligarchie, à la manière d’un parti ou d’un syndicat. La plèbe
est donc moins une catégorie sociologique qu’une notion idéologique et
stratégique.
Si nous regardons la composition des membres
de cette classe, en excluant les negotiatores
(marchands en gros) et argentarii
(financiers) qui sont des quasi-patriciens, nous pouvons trouver :
a) la couche moyenne constituée des boutiquiers (tabernarii) et artisans, correspondant à la
petite-bourgeoisie ; b) les proletarii
regroupant les orifices (travailleurs) et agences (ceux qui n’ont rien), comme
les petits artisans, journaliers, employés précaires, etc. ; c) la turba regroupant les exclus, les pauvres
et les itinérants (lumpenprolétariat) ; d) les paysans représentant alors
90% de la population totale. Même si le portrait de cette classe ne correspond
pas exactement à la stratification de la société québécoise en 2013, il n’en
demeure pas moins qu’elle permet dégager des traits qui peuvent être démarqués
par une définition politique de la
plèbe contemporaine.
Ainsi, Pierre-Karl Péladeau ne fait pas partie
du peuple québécois. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas un membre la société
québécoise et qu’il ne devrait pas avoir droit à cette nationalité. Mais le
fait qu’il soit membre du populus
québécois ne signifie pas qu’il fasse partie de la plebs, c’est-à-dire de l’ensemble des personnes opprimées par
l’oligarchie. PKP est un grand capitaliste, le propriétaire d’un empire
médiatique et un proche collaborateur de l’élite politique québécoise.
Autrement dit, c’est un patricien qui s’oppose objectivement au camp de ceux et
celles qui ont intérêt à renverser l’ordre social actuel. Il a beau être
souverainiste, mais il restera tout de même l’ennemi d’un mouvement populaire
de libération nationale et d’émancipation sociale.
La stratégie écosocialiste
L’unité populaire doit être formée par
l’articulation de demandes sociales non satisfaites, et qui demeureront
insatisfaites sans un changement radical dans la distribution du pouvoir
économique et politique. Autrement dit, ces demandes ne peuvent rester des
réformes isolées, une liste de politiques publiques pouvant être intégrées au
système institutionnel de l’État-providence. Elles doivent plutôt former une
chaîne d’équivalences de demandes populaires, appelant ainsi un peuple en tant
qu’acteur collectif prêt à lutter contre le système actuel. Trois grands types
de revendications peuvent avoir une telle portée : le renversement des
mesures d’austérité, la transition écologique et l’indépendance du Québec.
La première demande nécessite la création d’un
front social visant à contrer l’hégémonie néolibérale qui promeut la réduction
des dépenses publiques de l’État pour éliminer la dette. L’austérité touche la
hausse des frais de scolarité, les coupures dans l’aide sociale, la hausse des
tarifs d’Hydro-Québec et le maintien de la taxe santé, tout cela pour arriver à
l’atteinte du mythique déficit zéro. La récente campagne politique de
l’Association pour une solidarité syndicale étudiante va dans ce sens :
critiquer la « révolution culturelle » de Raymond Bachand et le
budget d’austérité de Nicolas Marceau qui sont des mesures idéologiques
contribuant à privatiser les profits et socialiser la dette.
La deuxième demande s’attaque au récent virage
pétrolier entrepris par le Parti québécois, dans la continuité de l’économie
extractiviste initiée par le Parti libéral du Québec. La poursuite du Plan Nord
(pour tous), la pseudo-réforme de la loi sur les mines, les partenariats pour
transporter le pétrole albertain par oléoducs ainsi que l’appui aux projets d’exploitation
d’hydrocarbures sur l’île d’Anticosti, à Gaspé et dans le golfe du St-Laurent,
montrent que les élites économiques et politiques n’ont rien à cirer des
changements climatiques. De plus, l’exploitation massive des ressources
naturelles non renouvelables semble être la seule voie de prospérité, la trappe
d’austérité contribuant à la stagnation économique et donc à la chute des
revenus de l’État. Un problème socioéconomique aggrave ainsi la crise
écologique, qui accentue à son tour les inégalités sociales et
environnementales.
Le front écologiste, représenté par le mouvement autochtone,
les groupes écologistes et les comités citoyens, doit donc s’unir aux
mobilisations sociales afin que le peuple puisse assurer la défense du
territoire et des communautés. Ces deux pôles représentent les jambes du
mouvement écosocialiste, qui lutte contre les conséquences écologiques et
sociales du capitalisme. Comme le rappelle Marx, « c’est ainsi que la production capitaliste, en développant la
technologie (...), ne fait qu’épuiser les sources originaires de toute
richesse : la terre et les travailleurs. »
Enfin, la troisième demande renvoie à
l’émancipation du peuple québécois de la tutelle de l’impérialisme américain,
des firmes multinationales et de l’État canadien. Cette dimension permet de
contrer l’antagonisme malsain du bloc nationaliste qui contribue à détruire
l’appui populaire au projet d’indépendance (surtout auprès des minorités), en
le déplaçant vers le véritable ennemi du peuple. En effet, l’État canadien
détruit les normes environnementales, dérèglemente la sécurité publique des
chemins de fer, attaque les syndicats et l’assurance-emploi, considère les
écologistes comme des terroristes et conteste la loi 99 sur
l’auto-détermination du peuple québécois. Ces quelques exemples montrent le
caractère terriblement actuel d’un mouvement de libération nationale, qui ne
doit pas s’enfermer dans le chauvinisme mais rester solidaire des autres
peuples du monde par une perspective internationaliste.
Il est intéressant de noter que ces trois
exigences sont symétriquement opposées au bloc nationaliste dirigé par le Parti
québécois : justice sociale vs austérité, écologie vs virage pétrolier,
indépendance vs identité. Ces demandes populaires ne doivent pas d’abord
constituer le programme d’un parti, mais contribuer à la formation d’un nouveau
bloc historique composé par des alliances entre syndicats et milieu
communautaire, mobilisations citoyennes et groupes écologistes, mouvement
indépendantiste et lutte anti-impérialiste. Ce bloc populaire reprend à son
compte la lutte des classes dans une perspective écosocialiste, tout en articulant
ce combat à la question nationale qui reste encore irrésolue.
Un aspect crucial de cette stratégie consiste à s’opposer diamétralement à l’hégémonie du Parti québécois, qui continue d’exercer son emprise sur les centrales syndicales, les groupes écologistes et le mouvement nationaliste. Tant qu’un parti de gauche n’aura pas réussi à convaincre une masse critique de la population, et que les mouvements sociaux resteront captifs du bloc dominant, les classes dominantes continueront de spolier le peuple et son territoire. Pour le meilleur et pour le pire, le temps des réformes est terminé ; la crise aura redonné un nouveau visage aux antagonismes, qu’ils soient sociaux ou ethniques, et seule un renversement de l’ordre social pourra apporter une véritable satisfaction aux trois demandes populaires. Le mot d’ordre est donc : écosocialisme ou barbarie identitaire.
Un aspect crucial de cette stratégie consiste à s’opposer diamétralement à l’hégémonie du Parti québécois, qui continue d’exercer son emprise sur les centrales syndicales, les groupes écologistes et le mouvement nationaliste. Tant qu’un parti de gauche n’aura pas réussi à convaincre une masse critique de la population, et que les mouvements sociaux resteront captifs du bloc dominant, les classes dominantes continueront de spolier le peuple et son territoire. Pour le meilleur et pour le pire, le temps des réformes est terminé ; la crise aura redonné un nouveau visage aux antagonismes, qu’ils soient sociaux ou ethniques, et seule un renversement de l’ordre social pourra apporter une véritable satisfaction aux trois demandes populaires. Le mot d’ordre est donc : écosocialisme ou barbarie identitaire.
[1] Antonio Gramsci, Œuvres choisies,
Éditions sociales, Paris, 1959, p.218
[2] Ricardo Peñafiel, La raison populiste, À Babord, no.30, été 2009
[3] Ernesto Laclau, La raison populiste, Seuil, Paris, 2008, p.91
[4] Ibid.,
p.92
[5] Ibid.,
p.93
[6] Ibid.,
p.101
[7] Sadri Khiari, Le peuple et le tiers-peuple, dans Qu’est-ce qu’un peuple ?, La Fabrique, Paris, 2013, p.118
[8] Ibid.,
p.118
[9] Ibid.,
p.118
[10] La
raison populiste, p.116
[11] Karl Marx et Friedrich Engels, Le manifeste du parti communiste,
Lanctôt éditeur, Montréal, 1998, pp.31-32
Ce qui est toujours problématique avec ce genre d'analyse, c'est qu'on est toujours enfermé dans un même cadre démocratique où la droite et la gauche doivent sans cesse être en rivalité à l'intérieur du même gouvernement. N'avez-vous jamais essayé de penser la société où la gauche et la droite serait séparé l'une de l'autre de tel sorte qu'il ne partagerait pas le même gouvernement, mais deux gouvernement parallèle qui aurait leur propre zone d'influence auprès de la population selon le désir et le choix de chacun. La rivalité gauche/droite ne doit pas coexister à l'intérieur d'un même gouvernement, mais par deux gouvernements parallèles, distincts, autonomes et indépendants, afin de laisser aux individus le choix du type de gouvernement à laquelle, ils veulent adhérer plutôt que d'imposer un seul gouvernement à tous les partis politique. On réclame plus d'indépendance du gouvernement du Québec vis-à-vis Ottawa parce qu'on ne veut pas aller dans la même direction qu'eux, mais pourquoi, on ne ferait pas la même chose avec le gouvernement du PQ en se séparant d'eux par la mise en place d'un gouvernement parallèle indépendantiste qui ne gouvernerait que les membres qui acceptent d'y adhérer. C'est cette absence de choix de gouvernement qui empêche toute forme de gouvernance alternative où la démocratie n'est qu'un moyen d'acquérir le pouvoir du seul gouvernement qu'on a et qu'on nous impose.
RépondreSupprimerCe peuple de gauche à laquelle vous aspirez existe, mais il n'est pas représenté par le gouvernement du PQ, alors cessez d'être qu'une simple éternelle opposition à l'intérieur de ce gouvernement en vous séparant d'eux par un gouvernement parallèle et laissez les gens vous suivre librement.
SupprimerÀ moins qu'on me dise comment il serait possible de diviser la société en deux systèmes parallèles du point de vue économique, politique, social et culturel, deux sous-sociétés nettement distinctes à l'intérieur d'un même État, je crois que nous serons obligés de vivre ensemble dans la même communauté politique.
SupprimerEn fait, un gouvernement parallèle qui gouvernerait seulement ceux qui désirent y adhérer est une contradiction, car un État n'est pas une association libre et volontaire, mais une structure sociale qui détient le monopole légitime de la violence et exerce ses lois sur l'ensemble de son territoire. La souveraineté de l'État signifie que celui-ci est un et indivisible, et ne peut donc pas se séparer spontanément en deux sans créer du même coup un nouvel État.
Ensuite, le peuple de gauche qui est décrit dans cet article n'existe pas encore, du moins il n'est pas pleinement formé et reste dispersé. C'est davantage une virtualité qu'une réalité concrète et pleinement achevée. Évidemment, la société québécoise n'est pas homogène et statique, et comporte plusieurs dimensions qui y cohabitent plus ou moins harmonieusement, parfois en opposition. Or, la société est une totalité, et la question est de savoir quel groupe particulier dirige la société, impose sa volonté et son influence économique, sociale et culturelle sur l'ensemble du corps social. Pour l'instant, c'est une classe dirigeante composante d'élites politiques et économiques, s'appuyant sur le système capitaliste et le gouvernement représentatif pour exercer son pouvoir sur les différentes couches de la société. Certaines d'entre elles sont liées par l'idéologie néolibérale, d'autres sont maintenant agglutinées par l'attrait du nationalisme identitaire, et certaines s'y opposent.
Cela montre que l'antagonisme n'est pas entre deux entités séparées et extérieures l'une à l'autre, comme entre l'Allemagne et la Grèce ou dans une moindre mesure le Québec et le Canada (qui pourraient se séparer en deux État souverains), mais entre deux blocs d'une même société. La réponse à cette contradiction ne peut être une simple ségrégation, mais un dépassement de cette situation par un renversement, un compromis ou le renforcement de l'ordre actuel.
Vous êtes trop enfermer dans vos définitions de ce qu'est un État. Vous devez sortir du cadre et définir la nation autrement. La nation ne doit pas se définir en fonction du droit du sol, alors oublié les frontières, les juridictions territoriale et repenser la nation comme si toute la population était sur une terre vierge où il n'y aurait aucun gouvernement et aucune frontière. Ensuite, reformuler l'État comme se formule une Église où les membres bien que dispersé appartienne à la même entité politique. La société québécoise n'est pas une totalité, car les séparations communautaire à caractère idéologique existe déjà. Alors, il ne s'agit pas de savoir quel groupe qui dirige la société ou les autre groupes, mais de s'assurer que les séparations communautaire entre les différents groupes déjà présent se matérialise librement sur le terrain politique par des institutions gouvernementale parallèle. Il ne doit pas y avoir de cohabitation politique au sein d'une même institution gouvernementale, car c'est évident que vous allez instaurer la loi du plus fort sur les autres. L'autorité doit-être obéit librement, elle ne doit pas s'imposer d'aucune manière, elle n'a pas cette légitimité de s'imposer encore moins par la violence. Les lois d'un gouvernement doivent régir que ceux qui y adhère à ce gouvernement, comme un contrat par consentement libre et volontaire qu'on établit entre le citoyen et le gouvernement de son choix. Il faut établir la loi de l'offre et de la demande sur le terrain politique de tel sorte que le gouvernement parallèle le plus efficace sera celui qui aura le plus d'adhérent, car il n'y a pas de saine compétition idéologique sur le terrain politique.
SupprimerJe pourrais concéder qu'il y a plusieurs façons de définir la Nation, surtout si nous la considérons comme une instance imaginaire à laquelle s'identifie plusieurs personnes. Par ailleurs, l'État n'est pas une Église, et il n'est guère utile de vouloir changer le sens des mots à ce point si personne ne l'utilise de cette façon. Ensuite, il n'est pas possible de concevoir une communauté politique et des institutions publiques à la manière d'une association privée et volontaire entre personnes. Cette vision réduit l'État à un marché ou une simple communauté, et ne correspond à aucune théorie présente en philosophie, en sociologie, en sciences politiques, en droit international, etc. Bref, cette conception du monde et de la société ne tient tout simplement pas la route.
SupprimerEn allant visiter le site de l'Église Catholique de la Nouvelle-France, j'ai trouvé très amusant le fait de définir la Nation par la grâce de Dieu, la doctrine catholique et une longue lignée remontant au baptême de Clovis et Jésus-Christ. Ce genre de théorie théologico-politique se rapproche davantage d'une idéologie religieuse que d'une pensée politique sérieuse. La nation ne découle pas de la foi, ni d'une mythique race française qui pourrait être réunifiée par un royaume sans frontières de l'Unité française. Bien qu'une conception spirituelle de la Nation est une chose concevable, elle ne pourrait être instituée par un gouvernement parallèle aux États officiels, si ce n'est par une Église de fidèles qui aurait un pouvoir spirituel, et non un pouvoir temporel. Autrement dit, cette perspective prône l'institution d'une religion, et non d'un État, à la manière de la Terre promise. Si cette religion devient une idéologie politique, alors deux attitudes sont possibles : 1) la création d'un nouvel État (à la manière des sionistes), ou bien la diaspora (comme les juifs hassidiques qui sont anti-sionistes et attendent le retour du Messie).
http://eglisenouvellefrance.org
Vous confondez le modèle de gouvernement que je propose à celui que vous aimeriez avoir. L'État fonctionne de la même manière qu'une Église, la seule différence c'est qu'elle impose son autorité sur ses membres ou ses citoyens si vous préférez. On adhère à une Église par choix volontaire et moi ce que je vous propose c'est de vous constituer un gouvernement parallèle qui serait à l'image de l'idéologie à laquelle vous adhérez. L'esprit de religion ou de culte est déjà présent au sein des partis politique, car ils ont déjà leur propre clergé ou porte parole avec leur symbole, ce n'est que l'habillement qui change et l'idéologie qui est véhiculé qui est différente, mais ils ont autant un programme politique que n'importe qu'elle dénomination religieuse et cela même s'il n'y a pas le concept de Dieu dans leur programme. La nation dans la bible et sous la plupart des anciens régime n'était pas fondé sur le droit du sol, mais sur des dénominateurs commun à caractère idéologique. L'espace géographique qu'est le Québec ne suffit plus à définir la nation, car la population qui l'habite est de plus en plus diversifié sur le plan idéologique et on le constate de plus en plus avec la charte du PQ, les carrés rouge et l'immigration en générale. Si vous voulez une société plus juste, vous devez séparer les justes de ceux qui le sont moins à vos yeux ou sinon les injustes domineront sur le groupe ou les groupes que vous défendez. Ensuite, la religion est toujours politique c'est indissociable, mais le gouvernement à laquelle j’appartiens qui ne sera pas nécessairement le vôtre n'aurait d'autorité que sur ses membres qui y adhère librement d'où l'erreur des sionistes qui définissent leur terre promise sur le droit du sol, un sol qui est aussi occupé par une autre nation bien distincte de la leur. Un territoire peut très bien contenir plus d'un gouvernement de la même manière qu'on a plusieurs municipalités. Lorsqu'on a qu'un seul gouvernement, on recherche toujours à être en situation majoritaire car la démocratie l'impose, mais le résultat est qu'il y aura toujours pour effet d'opprimé les minorités de ceux qui ne pensent pas comme nous. Pour ma part, je ne vote plus depuis longtemps, car j'ai toujours le sentiment d'imposer mes idées par mes choix électoraux à ceux qui ne partagent pas les mêmes idées que moi.
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